lundi, mai 29, 2006

Soupe de dindon au curie ? - Areva KK (4)

Pendant que K-Challenge fait des ronds dans l'eau - d'ailleurs, le défi français s'est pas mal illustré, soulignons-le - et entretient la forme de son équipage tout en soignant le blason d'un certain groupe nucléaire, Areva avance ses billes dans la chasse aux noms de personnes illustres.

Dernière manoeuvre en cours, comme mentionné plus bas : s'attribuer le nom de Marie Curie pour son site de La Hague. La holding ne se cache même pas. A qui va profiter le crime ?
Parce que là, c'est sûr, Areva graisse la patte de l'oie (laquelle ?), d'un côté, sous prétexte de sponsoriser un festival de correspondances et de l'autre, elle va empocher un beau certificat d'exploitation. Ce n'est pas pour envoyer Marie au charbon... radioactif, mais ça y ressemble !

Areva, strass et paillettes - Areva KK (3)

(suite de l' article)
Les prérogatives du groupe sont Développement durable, Grandes Ecoles et lobbying. En bonne sherpa mitterrandiste, Anne Lauvergeon applique une politique… infaillible ?

Anne Lauvergeon peut se frotter les mains. Sa campagne mondiale de publicité d’une centaine de millions d’euros a marqué des points. Ses efforts pour positionner Areva comme valeur montante ont fonctionné. Il faut dire que pour séduire son monde, Anne Lauvergeon s’est adjugée les services d’un ancien de chez Hermès, histoire sans doute de se mettre au parfum en terme de marketing. Résultat, même Martin Bouygues et Gérard Mestralet s’y sont laissés prendre.

Les grands patrons ne sont pas ses seules victimes. Un pied à Polytechnique, un autre à HEC, Areva essaye de séduire les futurs cadres en s'immisçant dans les Grandes Ecoles. Le groupe se veut une référence, un modèle pour les jeunes diplômés. « Funky » Areva vend des perspectives de carrière alléchante qu’il placarde dans les vitrines ou accueille des jeunes scolaires pour les éduquer sur le développement durable « made in Areva ».

Le DD : la réponse ultime
Pendant ce temps dans les usines, les salariés ont aussi droit à leurs affiches où l’on présente le groupe comme un défenseur des grands principes… moralisateurs. Comme si ce matraquage était capable de résoudre les conflits et offrait des réponses satisfaisantes à tout le monde. Seuls les managers, qui tournent sur des sièges de plus en plus dorés, semblent y trouver leur compte ! Aujourd’hui chez Areva, le développement durable semble la réponse ultime face aux « antinucs », à la fermeture de sites, à l'absence de stratégie industrielle et de perspectives commerciales. Dans les faits cependant, le pseudo-décisionnel ne sert qu’à installer un climat social un peu plus délétère, la multiplication des indicateurs instaurant un management par chiffres interposés que les responsables s'empressent d'épouser. Depuis le rapprochement en 2001 de Framatome ANP, de Cogema puis de T&D (issu d’Alstom), la crise pointe. Les premiers concernés sont la nébuleuse de sous-traitants plus ou moins "arevatisés" et la diversité des conventions collectives, source continuelle de conflits entre personnels. Pour un seul et même service, il n'est pas rare d'avoir plus de cinq traitements différents, avec son lot de primes et d’avancement inégaux… Surtout qu’avec le DD, pressuriser au maximum les sous-traitants devient un acte citoyen : « faites un effort, c'est pour les générations futures ! »

Lobbying et institutions, à la française
Outre-atlantique, Anne Lauvergeon déploie sa stratégie d’une autre manière. En réponse à ses récents échecs américains, elle vient de recruter un ancien sénateur du Congrès américain et ex-secrétaire d’état à l’énergie, Spencer Abraham. Anne Lauvergeon espère peut-être en faire un lobbyiste avisé alors qu’il a démissionné de son poste au lendemain de la réélection de G.W. Bush ? Qu’à cela ne tienne, elle persiste et signe. Et n’hésite pas à engager des mesures contraires. Ainsi, en France, après essuyé plusieurs refus du gouvernement pour privatiser le groupe, elle a trouvé un nouveau ressort : institutionnaliser Areva en donnant des noms d’hommes illustres aux différents sites industriels. Seul pépin : qui accepterait de voir le nom de Marie Curie donné en pâture aux cheminées de la Hague ?

vendredi, mai 26, 2006

Areva ou le mythe d’une réussite - Areva KK (2)

(il s'agit d'un ancien article écrit par votre serviteur fin mars 2006)

Le soi-disant leader mondial du nucléaire vient d’annoncer ses résultats financiers et la bonne tenue du groupe à l’étranger… mais il est sur le point de perdre le marché chinois. Cet échec imminent remet en cause en profondeur le « système Areva ».

Les résultats d’Areva pour 2005 sont tombés au début du mois de mars. Le groupe français spécialisé dans le nucléaire affiche un bilan financier « à nouveau en progression ». L’avenir s’ouvre radieusement devant lui, est-on tenté de croire, surtout lorsque la charismatique présidente du directoire vante les réussites de son groupe : « Nos activités nucléaires récurrentes poursuivent leur progression et confortent notre position de leader en Europe et aux Etats-Unis ». Mais c’était sans compter les rumeurs qui voient le leader mondial du nucléaire battu par les américains sur le marché chinois. Or, la stratégie d’Anne Lauvergeon reposait essentiellement sur ce créneau. Pourquoi ?

La foi d’Anne Lauvergeon

A trois mois de la remise en ballottage de son mandat de présidente du directoire, elle comptait énormément sur un succès pour renforcer sa place. Le marché du nucléaire chinois offrait en effet de belles perspectives. Anne Lauvergeon tient en effet du vice-premier ministre de la république populaire de Chine, Zeng Peiyan, venu en France en juin 2004, une confidence importante : la Chine se doterait non pas de 40 centrales nucléaires, mais de 400 pour faire face à la demande en électricité de ses habitants, a-t-on appris de source interne au groupe. Le chiffre, certes énorme, ne surprend pas les spécialistes. Un récent rapport de Capgemini pour le compte d’EDF et de China Electricity Council indiquait que la Chine souffrirait d’un déficit de 280 gigawatts en 2020.

Une absence de perspectives commerciales…

L’échec annoncé d’Areva à Pekin est révélateur de la situation très floue dans laquelle marine Areva aujourd’hui. Commençons par le secteur des mines, le groupe étale son ambition de devenir leader dans le minerai d’uranium. Mais avant d’être confronté à d’éventuels concurrents, le groupe affronte surtout son impuissance à mobiliser des liquidités, notamment à cause du refus du gouvernement de privatiser Areva. Le chantier est pourtant en marche depuis la création du groupe en 2001 et Anne Lauvergeon s’y est largement employé sous les gouvernements successifs. Les salariés ont déjà reçu une première sensibilisation à l’actionnariat et on rêvait déjà de stock options chez les cadres dirigeants.

Du côté de la construction des réacteurs, c’est différent : il n’y a pas de stratégie industrielle. Une modernisation de l'usine de Châlon-Saint-Marcel est bien prévue, mais sans véritable investissement dans un outil performant. Au lieu de cela, Areva continue à sous-traiter aux japonais, et à Mitsubishi en l'occurrence, la réalisation des cuves de réacteurs. Ce sera le cas pour le réacteur finlandais, pour l’EPR de Flamanville et pour les EPR américains si Areva décroche le contrat.

Cette absence de vision à long terme se répète également dans le retraitement, où EDF continue à entretenir la Hague depuis près de quarante ans. Les deux usines actuelles n’ont que peu ou prou de contrats étrangers, ils servent à dilapider la technologie et le savoir-faire aux concurrents japonais et anglais. Le challenge d’Areva – pour ne pas dire le défi - consiste à faire durer le plus longtemps possible l’activité de ses usines.

La dernière branche concerne la fabrication du combustible Mox au Tricastin. Là encore le constat est morose et la compétitivité va être plombée par la hausse des prix de l’électricité que lui revend EDF. Les Russes sont heureusement fidèles au poste pour ré-enrichir l’uranium tiré du retraitement.

…et une sclérose orchestrée par les américains

La situation d’Areva serait plus confortable aujourd’hui si le marché américain montrait en contre-partie des perspectives réjouissantes. Force est de constater on en est loin. Malgré une branche logistique relativement active, Areva vient de subir un échec retentissant en étant expulsé du chantier Yucca Mountain, où les américains comptaient enterrer leurs déchets nucléaires américains.

Titubant, le groupe rassemble ses forces pour percer dans le Mox et construire une usine. On peut s’interroger sur la stratégie d’Anne Lauvergeon. Est-elle assez naïve pour croire que la branche américaine d’Areva restera dans son giron ? Si Bush confirme son impulsion dans le nucléaire, un concurrent sera subventionné ou on coulera Areva Inc. à force de procédures judiciaires kafkaïennes. Le groupe français le sait puisqu’il a vécu une expérience douloureuse lors du rachat d’un concurrent américain. La branche métrologie d’Areva, Eurisys Mesures, se mord encore les doigts d’avoir racheté Canberra. Celle-ci a pris l’ascendant sur les français au point de verrouiller tous les postes-clés… et de changer son nom !

Cet exemple est révélateur des problèmes internes chez Areva et dans ce contexte difficile, un rapprochement entre Areva et Alstom, bien que commanditées par les banques et BNP Paribas en tête, ne perd plus tout son sens. Surtout si cela permet la constitution d’un vrai leader industriel aux épaules larges. Les deux groupes sont d'ailleurs engagés au niveau européen et travaillent main dans la main avec des firmes allemandes. Pourtant, avant de croire à une alliance franco-germanique, regardons en France. Si le mariage entre GDF et Suez est consommé, la porte va s’ouvrir en grand pour créer une entente entre EDF, Areva et Alstom.

Areva KK (1)

C'est un secret de polichinelle dans le groupe, mais Anne Lauvergeon sera reconduite dans ses fonctions de présidente.

Même s'il n'y a toujours pas de projet industriel chez Areva, Nanou a trop fait pour son image :
- campagne de pub internationale (surtout aux USA),
- des bateaux pour noyer le poisson (et les déchets nucléaires ? ou est-ce pour mieux naviguer sur la Soupe ?),
- positionnement politique, puisque l'ancienne Sherpa de Mitterand a ses entrées chez Sarkozy...

Et comme Breton joue au cerbère, que Villepin ne veut pas donner un coup de fouet salvateur (tiens, mais ce n'est pas une attitude conservatrice, ça ? On aurait pas peur du changement chez D2V ?), Nanou restera en place. Finalement les Nantis de son groupe pourront vieillir au calme...

...en refusant de voir que leur paquebot nucléaire coule. Ca risque de faire des tâches - radioactives - dans la Soupe pendant quelques générations (futures) !

La Soupe

Il était une fois une Grande Soupe populaire, avec ses petits légumes que l'on avait hachés menus et mis à bouillir dans l'eau. Tous les morceaux de navets, de carottes, de patates ou de poireaux, essayaient tant bien que mal de surnager dans la Soupe, de se repérer les uns par rapport aux autres, de vivre leur vie de légumes...

Puis vinrent les croûtons. Sur ces sortes de soucoupes flottantes, des petits morceaux de légumes réussirent à se hisser. Comment ? Pourquoi ? Tout n'est pas question de chance dans leur réussite, mais nous dirons qu'ils étaient "mieux nés".

Sur leur piédestal, ces petits morceaux firent une farandole, se baptisèrent les Nantis et s'organisèrent. Profitons d'être sur un croûton ! Premièrement, construire un mur pour que personne d'autre ne rentre. Deuxièmement, bâtir une usine à pain. Troisièmement, embaucher des morceaux pour faire le travail. Quatrièmement, vendre les petits pain aux morceaux dans la Soupe en échange d'un peu de leur âme.

Résultat : une fumée noire se dégage du croûton, le fouet claque et résonne dans l'usine, les petits pains se vendent sans mal, et les âmes dansent tout autour des Nantis qui sourient en brassant leurs dollars...

Un siècle se passe. La méthode change un peu. On motive les achats à coup de campagne marketing et on flique les ouvriers tout en leur faisant la morale : « fais pas ci, va pas là », « prends-toi ça, passe par là » ou « c’est comme ci, pas comme ça ». « Comprenez, c’est pour votre bien ! »

La sacro-sainte rentabilité des Nantis se cache désormais derrière un vocabulaire de moins en moins compréhensible par nos petits légumes. Ceux-là même se noient en regardant la Star Ac’ pour oublier la pollution au-dessus de leur tête et les terroristes qui guettent leurs moindres gestes… si l’on en croit les médias.

Pourtant, les terroristes sont toujours dans leurs hamacs, fumant leurs gros cigares, pressurisant les énergies un peu trop vives et profitant de la masse pour envoyer au casse-pipe les jeunes petits légumes... pourvu que ça profite à la carrière du Nantis. Qui t’entend crier dans le slogan publicitaire ?

Le son du cor...

Système :
(plusieurs définitions)
1/. ensemble organisé d'éléments intellectuels
2/. ensemble coordonné de pratiques tendant à obtenir un résultat
3/. ensemble présentant une certaine unité


Individu :
Unité élémentaire, être particulier différent de tous les autres.